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Les concentrations de particules fines du chauffage au bois dans l’air, proportionnellement trois fois plus faibles que les estimations d’émissions !

Les concentrations de particules fines du chauffage au bois dans l’air sont proportionnellement trois fois plus faibles que les estimations d’émissions réalisées jusqu’ici, photo Frédéric Douard

Depuis 1990, les émissions françaises de particules PM2,5 ont été réduites de plus de 60% [1] notamment dans les secteurs résidentiel et tertiaire. Or, depuis plusieurs années, de nombreuses publications attribuent au chauffage au bois, en général, et au chauffage au bois domestique, en particulier, une part très importante des émissions de PM2,5 (43%, en 2021, puis 64% à la suite de la révision des facteurs d’émission proposée par l’étude INERIS-CITEPA [2]). Mais, les concentrations de particules réellement respirées se distinguent de ces estimations d’émissions de polluants. Ces dernières sont calculées annuellement par le CITEPA dans son inventaire national réalisé selon une méthodologie européenne (EMEP/EEA). Ces données correspondent aux estimations de rejets dans l’atmosphère de particules liées à des activités humaines. Ces résultats ne prenant pas en compte les évolutions et transformations des polluants dans l’atmosphère, il n’y a donc pas de corrélations simples entre les quantités émises et les niveaux de concentrations de ces polluants dans l’air ambiant.

L’avis d’Expert du Laboratoire CERIC a analysé, sur deux années, les données journalières de concentrations de particules PM2,5 relevées en temps réel par 89 stations de mesures françaises, répertoriées sur le site Geodair.fr, afin d’estimer la part attribuable aux activités spécifiques hivernales dont le chauffage au bois domestique. Le relevé des stations prend en compte les concentrations de particules fines, réellement respirées dans l’air par la population.

LES CONSTATS

Constat 1 : La part du chauffage au bois domestique dans les concentrations nationales de particules PM2,5 est inférieure à 22,4%. Elle est largement inférieure aux estimations d’émissions de 64%, chiffre régulièrement communiqué.

L’analyse de qualité de l’air des 89 stations permet de démontrer que les activités hivernales spécifiques représentent en moyenne 22,4% des concentrations de particules PM2,5 respirées. Compte tenu des autres activités émettrices de particules fines, on peut raisonnablement estimer que la part du chauffage au bois dans les concentrations annuelles de PM2,5 est sensiblement inférieure à 22,4%.

Représentation de la proportion (en %) de concentrations annuelles de particules PM2,5 liée aux activités spécifiques hivernales dans 89 villes, crédit Céric

Constat 2 : Le nombre d’appareils sur un territoire a peu d’impact sur les concentrations

Selon les dernières études de marché d’Observ’er [3] [4], l’AURA, la Nouvelle-Aquitaine et la Bretagne sont les régions dans lesquelles se vendent le plus d’appareils au bois domestique, impliquant une densité d’appareils supérieure aux autres régions. Pour autant, les taux de concentration particules PM2,5 constatés ne sont pas les plus importants. Ce constat vaut aussi pour la région Hauts-de-France, densément peuplée et largement équipée d’appareils de chauffages au bois. L’accroissement du parc d’appareils ne rime donc pas forcément avec accroissement des émissions de particules.

Évolution de la masse de PM et de leur distribution granulométrique selon la génération du poêle, crédit Céric

Constat 3 : La qualité de l’air des grandes villes est peu impactée par les activités hivernales (donc par le chauffage au bois)

La part des activités hivernales dans les concentrations de PM2,5 respirées dans les 5 premières villes de France (Paris, Marseille, Lyon, Toulouse et Nice [5]) représente, entre 2% et 30,9%, soit une moyenne de 17% environ.

Constat 4 : La topographie et les vents influent sur les concentrations

Si les concentrations de particules PM2,5 sont maîtrisées au niveau national, des zones présentent des données supérieures à la moyenne nationale sans toutefois dépasser 35% de contribution pour les activités hivernales. Ces résultats s’expliquent notamment en raison de la topographie des lieux.

Illustration des sources de particules dans l’air

LES CONCLUSIONS

Cet avis a démontré que les concentrations de particules PM2,5 issues des activités hivernales, dont une part significative concerne le chauffage au bois domestique, sont proportionnellement trois fois moins importantes que les estimations d’émissions qui sont communiquées au grand public.

Les mesures déjà prises par le secteur (amélioration continue des appareils, formation des installateurs et qualité du combustible bois), soutenues par le plan d’actions pour réduire de 50% les émissions de particules fines du chauffage au bois domestique [6] ont permis de réduire fortement les émissions de particules (-62% de PM2,5 entre 2000 et 2021), améliorant la qualité de l’air respiré et donc les concentrations mesurées (-48% de PM2,5 entre 2000 et 2021) [7]. Cette dynamique doit se poursuivre notamment grâce à une politique publique adaptée et aux efforts permanents déployés par la filière bois-énergie.

LES RECOMMANDATIONS

I- Communiquer sur les données de concentrations de particules PM2,5 réellement respirées par nos concitoyens

En retenant les données de concentrations de particules, il est possible de mieux cibler les causes et d’affiner les stratégies sanitaires pour garantir une bonne qualité de l’air aux Français.
Par ailleurs, il apparait, pour la bonne compréhension du public, de bien distinguer estimations et concentrations et de communiquer sur ces dernières. Elles reflètent la réalité de la qualité de l’air respiré par les Français.

II- Approfondir les méthodes de calcul des estimations d’émissions

L’écart entre les estimations d’émissions et les concentrations s’avère très important. Une évolution des hypothèses et des modalités de calcul, avec une pondération prenant en compte les concentrations, pourrait notamment réduire ces écarts.

Ce travail doit notamment être porté au niveau européen dans le cadre d’une révision de la Directive 2016/2284 réduction des émissions nationales de certains polluants de 2016.

III- Poursuivre le plan d’actions de réduction des émissions issues du chauffage au bois en France

Cette stratégie doit être pilotée par l’ADEME en lien avec les professionnels du secteur. Elle doit permettre la mise en oeuvre d’une politique publique qui :

  • Renforce les démarches de qualité en matière d’installation et de maintenance des équipements
  • Massifie l’offre de combustible de qualité
  • Communique auprès du grand public sur les bons usages
  • Anticipe les évolutions des seuils à venir (mise en oeuvre des recommandations OMS)
IV- Encourager et soutenir l’installation d’appareils de chauffage au bois performants

Dans le but d’améliorer la qualité de l’air, ce soutien à la conversion vers les meilleures technologies disponibles, via les aides publiques (par exemple Fonds air bois, MaPrimeRénov’…), doit concerner l’installation en primo-équipement et le remplacement des anciens appareils. Des coups de pouce (CEE ou fonds air bois) pourraient notamment soutenir le remplacement des équipements les moins performants (foyers ouverts, appareils de plus de 20 ans).

>> Télécharger l’avis d’experts du laboratoire CERIC

Contact : www.laboratoire-ceric.com

Bibliographie : 

  1. CITEPA, «Gaz à effet de serre & polluants atmosphériques. Bilan des émissions en France de 1990 à 2022. Rapport Secten,» 2023. En ligne à ce lien.
  2. INERIS, «Réévaluation des facteurs d’émission des particules totales (solide et condensable) du chauffage domestique au bois,» 28 juillet 2022. En ligne à ce lien
  3. Observ’ER, «Etudes Observ’er Suivi du marché et des prix des appareils domestiques de chauffage au bois en France,» 2022. En ligne à ce lien
  4. Observ’ER, «Etudes Observ’er Suivi du marché et des prix des appareils domestiques de chauffage au bois En France,» 2023. En ligne à ce lien
  5. INSEE, «Statistiques INSEE,» 2020. En ligne à ce lien
  6. Ministère de la Transition Ecologique, «Plan d’action Réduction des émissions issues du chauffage au bois en France,» 2021. En ligne à ce lien
  7. Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, «DATALAB Bilan de la qualité de l’air extérieur en France en 2021,» octobre 2022. En ligne à ce lien




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