Pourquoi une partie de la première énergie renouvelable de France, le bois de chauffage, n’est-elle pas encore efficacement mise en œuvre ?
Le bois est la première source d’énergie renouvelable de France, d’Europe et même du Monde entier. Et en France, le bois en bûches représente 70 % de tout le bois-énergie consommé. Cela en fait le premier vecteur effectif de la transition énergétique du pays dans la lutte contre le dérèglement climatique. Il ne faut cependant pas oublier, et d’aucuns le rappellent tous les jours à juste titre, que renouvelable ne rime pas forcément avec efficacité ou air pur. La combustion du bois est en effet une réaction complexe qui pour être complète, efficace et non polluante doit obéir à plusieurs règles. Parmi ces règles, la combustion du bois en bûche doit en respecter une toute première, à savoir celle de ne brûler que du bois sec.
Alors en France, les autorités informent bien sur le fait de ne devoir brûler que du bois sec. Sauf que le bois sec, ça n’existe pas dans la nature en période de chauffage en Europe. Il faut donc le sécher. Et la méthode la plus simple et la plus ancienne est de couper, de fendre, de mettre le bois à l’abri dans un endroit ventilé et d’attendre suffisamment longtemps : entre 6 et 16 mois selon le type de bois, les dimensions auxquelles il a été coupé et le lieu géographique où est réalisée l’opération. Cette pratique reste aujourd’hui la plus utilisée en France mais demande deux conditions, notamment pour les producteurs professionnels : disposer de suffisamment de place, et surtout de suffisamment de trésorerie. Par ailleurs, cette organisation se heurte régulièrement aux variations quantitatives du marché, les conditions précédemment énoncées interdisant de stocker à outrance. Par conséquent, il est indispensable pour les producteurs de disposer d’un équipement de séchage artificiel, pouvant travailler dans un délai court, pour absorber les pics de demande du marché, souvent brutaux du fait des habitudes actuelles de consommation sans stock.
Et c’est là que le bât blesse. Et il blesse même presque tous les ans depuis qu’on parle des émissions du chauffage au bois, car les producteurs de bois de chauffage, qui sont dans leur immense majorité de petites entreprises, n’ont ni les capacités de financer un séchage long, ni d’investir dans des hangars ou dans des séchoirs. Alors, lorsque la société demande des efforts de qualité pour son propre bien-être, il faut que la société prenne en charge a minima une partie de l’effort, en aidant les producteurs de bois de chauffage à produire du bois sec en quantité suffisante. Et le constat en France, en 2024, 26 ans après la signature des accords de Kyoto sur le climat, est qu’il n’existe aucun dispositif d’aide pertinent pour relever le défi de rendre totalement non-polluant le recours à la première énergie renouvelable du pays : le bois bûche.
Il existe bien actuellement un dispositif mis en place par l’Ademe, mais il est si confidentiel et si exigeant dans ses critères d’attribution, que personne ou presque ne l’utilise. Alors en France en 2025, les finances publiques ne feront pas de miracles, mais si une partie moins ridicule des aides publiques restantes pour la transition énergétique pouvait enfin être fléchée vers le bon usage de la première source d’énergie renouvelable de France, alors un pas serait franchi dans la bonne direction.
Frédéric Douard, rédacteur en chef